AHIS 27F10 - Récits, représentations et usages du passé
L'histoire des historiens s'inscrit dans un panel de figurations et d'appropriations du passé. Elle s'en distingue tout en y faisant écho. L'approche scientifique, fondée sur une quête de vérité et d'objectivité, à partir de procédures et de règles d'administration de la preuve, coexiste avec une multitude de rapports sociaux et politiques au passé, qui n'ont cessé de se démultiplier au cours des trente dernières années. Les revendications mémorielles, les demandes de réparation, les constructions idéologiques, la réinvention des traditions nourrissent des discours nombreux et contradictoires sur le passé, qui empruntent des formes variées (littérature, cinéma, commémorations, collections, etc.). Le passé est un objet en partage, dont les usages sont au cœur des conflits politiques et sociaux à travers notamment l'extension du phénomène de concurrence victimaire. Tout l'enjeu de cet enseignement consiste à comprendre les logiques et les formes de ces divers usages, tout en délimitant la spécificité du savoir historique, de ses exigences et de ses objectifs, de son rôle possible dans le paysage actuel des guerres de mémoire.
Lectures demandées : Marc Bloch, « Réflexions d'un historien sur les fausses nouvelles de la guerre », Revue de synthèse historique, 1921, reproduit in Écrits de guerre (1914-1918), textes réunis et présentés par Étienne Bloch, Paris, Armand Colin, 1997, p. 169-184 (extraits : p. 169- 173 ; 177-184). Pierre Vidal-Naquet, Les Assassins de la mémoire. Un « Eichmann » de papier et autres essais sur le révisionnisme, Paris, La Découverte, 1987, chap. 4, « Thèses sur le révisionnisme (1985) », p. 108-133.
Lectures complémentaires : Javier Cercas, L'Imposteur, Arles, Actes Sud, 2015 [2015]. Georges Lefebvre, La Grande Peur de 1789, Paris, Armand Colin, 1970 [1932]. Carlo Ginzburg, « Préface », Lorenzo Valla, La Donation de Constantin. Sur la donation de Constantin, à lui faussement attribuée et mensongère, texte traduit et commenté par J.-B. Girard, Paris, Les Belles Lettres, 1993, p. ix-xxi. Helmut Walser-Smith, La Rumeur de Konitz. Une affaire d'antisémitisme dans l'Allemagne
1900, Paris, Phébus, 2003 [2002]. Sergio Luzzato, Padre Pio. Miracles et politique à l'âge laïc, Paris, Gallimard, 2013. Gérald Bronner, La Démocratie des crédules, Paris, PUF, 2013. Jefferson Pooley, Michael J. Socolow, « The myths of the War of the Worlds panic », Slate,
28 octobre 2013 : http://www.slate.com/articles/arts/history/2013/10/orson_welles_war_of_the_worlds_pan ic_myth_the_infamous_radio_broadcast_did.html?via=gdpr-consent).
Automne 2024-2025
Aux 2 heures hebdomadaires de cours magistral s'ajoutent 2 heures de conférences de méthode (total de 48 h sur le semestre). L'évaluation s'appuiera sur une note de contrôle continu (2/3 de la note globale) et une note d'examen final (1/3 de la note globale).
La note de contrôle continu est attribuée dans le cadre des conférences de méthode. Elle comprend :
- une note de projet collectif qui consiste en une enquête préparée et réalisée tout au long du semestre par groupe de 3 à 5 étudiants, sur un cas précis de mise en récits du passé (enjeu mémoriel, controverse historiographique, usages sociaux du passé, muséographie, etc.) ; - une note de travail écrit individuel, qui prendra la forme d'un commentaire de
documents ; - une note de galop (commentaire de document) ; - une note de participation.
La note d'examen final est celle obtenue par les étudiants à l'épreuve écrite de fin de semestre. D'une durée de 3 heures, cette épreuve consiste en un commentaire écrit de document, dont le sujet sera en lien avec les grandes problématiques du cours magistral. Y sera évaluée la capacité des étudiants à analyser des documents de nature variée (textes d'historiens, œuvres d'art, extraits de romans, pétitions, etc.), à distinguer diverses modalités de mises en récit du passé, et à mobiliser les lectures évoquées en cours magistral pour réfléchir aux usages pluriels du passé dans l'espace public.
Maryline Crivello, Patrick Garcia, Nicolas Offenstadt (dir.), Concurrence des passés, Aix-enProvence, Publications de l'université de Provence, 2006.
Ivan Jablonka, L'Histoire est une littérature contemporaine. Manifeste pour les sciences sociales, Paris, « La Librairie du XXIe siècle », Paris, Le Seuil, 2014.